- Calmez-vous, calmez-vous.
Juan Filiberto n’en finissait pas de consoler Alicia, miraculeusement rescapée de la fusillade.
- Est-ce que vous pouvez marcher ? Nous allons vous conduire à l’hôpital. Pour l’instant, vous avez besoin de soins et de repos.
Puis, se tournant vers l’entrée du sous-sol derrière lui :
- Envoyez-moi un ambulancier, cette femme a besoin d’aide !
- Merci, parvint-elle à murmurer.
- Ecoutez… Ce serait mieux si vous lâchiez cette arme. Elle n’a rien à faire entre vos mains. Vous l’avez trouvée par terre, n’est-ce pas ?
Regards.
Silence.
Puis un gémissement diffus et Juan Filiberto qui se tourne vers une autre victime. Il a déjà oublié. Il a déjà effacé de sa mémoire ce qu’il a vu. En théorie au moins… L’arme est dans la poche de sa veste, à l’abri.
***
Miguel Angel ne cessait de marteler ses arguments :
- Quelque chose nous échappe. Selon la balistique, l’arme qui a tué Claudia Luschini n’est pas parmi celles que nous avons retrouvé sur place, ni parmi celles des policiers qui ont participé à l’assaut. C’est invraisemblable !
- Ecoute Miguel Angel, ce fut très confus. Il y a des choses que nous ne pourrons jamais comprendre, ou expliquer. Claudia Luschini est morte, Bisbal – ou Kirchner – est incapable de parler pour l’instant et il restera probablement longtemps dans cet état.
- Ça m’énerve de ne pas comprendre ! Où est-elle cette arme ?
- Tu as pensé aux tireurs d’élite ? Le président n’a pas voulu qu’on les interroge. Secret défense.
- Je croyais qu’ils étaient restés sur le toit du Club nautique.
- Va savoir… Dans la cohue !
- Dis, Miguel Angel… Ça te dirait de me remplacer quelques temps à la tête de la brigade ?
- Qu’est-ce qui se passe, Chef ? Vous prenez des vacances ? Ou vous voulez changer de sujet ?
- Disons que changer de sujet, c’est déjà des vacances… Tiens, en parlant de changer de sujet, regarde : nous sommes de mariage samedi prochain :
- Ah bon, qui ça ?
- Ana Laura et Andrés.
- Ils n’ont pas de chance ces deux. Ils annoncent du mauvais temps pendant tout le week-end. Après ce qu’ils ont vécu, un peu de soleil n’aurait pas fait de mal !
- C’est pas grave.
- Oui, je sais.
- Mariage pluvieux…
Une fois de plus, Juan Filiberto de Dios laissa à son adjoint le soin de poursuivre sa pensée. Mais celui-ci, qui s’habituait peu à peu à travailler avec le commissaire, laissa l’espoir se fondre peu à peu dans le silence, comme pour mieux l’habiter.
[FIN]